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La dépêche du CATC

Dépêche / Novembre 2017

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A propos du Nei Jing

Jacques Lavier

 

A propos du Nei Jing, d'après Jacques André LAVIER.

 

Note : le Nei Jing est l'ouvrage qui fonde la médecine traditionnelle chinoise et auquel se réferrent la plupart des écoles. Ce texte de Mr Lavier nous incite à ne pas prendre tout ce qu'il contient comme argent comptant. Le Pfr Leung nous avait lui aussi mis en garde contre les "erreurs" contenues dans le Nei Jing.

 

Quelle que soit la datation de la première rédaction, l'antiquité du texte et, en tous cas, des idées qu'il exprime, est très grande. Les éditions successives s'enrichirent peu à peu, au cours des âges, tandis que s'accumulaient les observations (....) Dans chacune des éditions, les auteurs superposent des commentaires au texte original, qui est d'une extrême concision et d'une interprétation ardue. Il est bien difficile aujourd'hui de distinguer ce qui résulte des additions successives, dues à une sorte de sédimentation ininterrompue, de ce qui appartient à l'oeuvre initiale et à la tradition.

 

En outre, de nombreuses erreurs de compilation sont intervenues dans ce traité, et le Père L. Wieger, patron des sinologiues modernes, a bien souvent tonné contre les scribes ignorants qui ne comprenaient pas ce qu'ils recopiaient et qui, pour écrire plus vite, déformèrent considérablement les caractères originaux. Mieux : non contents d'altérer insensiblement les caractères d'écriture, les scribes en ont remplacé un certain nombre, trop difficiles à tracer, par d'autres plus simples et ressemblants, oubliant que ces derniers possédaient déjà des sens tout différents. C'est pourquoi il faut considérer le Nei Jing Su Wen tel qu'il se présente aujourd'hui comme un texte très concis dont le sens réel a été en grande partie perdu du fait des scribes, et dont le fonds est noyé dans les commentaires dont il est assorti, commentaires que les idées personnelles des interprètes rendent trop souvent divergents.

 

Le tableau n'est cependant pas aussi sombre qu'il paraît, et il y a heureusement un certain nombre de points communs entre les différentes éditions. Il n'est dès lors pas illogique - mais c'est là affaire de sinologie qui dépasse notre propos - de penser que cette commune racine pourrait bien être le fonds réel du traité, présenté par tous les commentateurs comme un dialogue entre Huang Ti, l'empereur jaune et Qi Bo, son médecin et probablement aussi son ministre.

 

C'est dans ce dialogue que l'on trouve les raisons qui incitèrent Huang TI à promouvoir l'acupuncture :

"Huang Ti s'adresse à Qi Bo :

- Moi qui suis le chef d'un grand peuple, responsable d'une multitude de familles, et qui devrais donc en percevoir les impots, je constate avec affliction que je n'en perçois point parce que mon peuple est malade. Je veux que l'on cesse d'administrer des remèdes qui rendent mon peuple encore plus malade. Je veux que l'on abandonne les Pien Cheu pour n'employer désormais que les aiguilles de métal, que l'on pique dans les Jing afin d'agir sur le Sang et le Qi, et d'en rétablir le bon équilibre.

Afin que cet art puisse être transmis aux générations futures, il faut que ses lois soient définies, que sa pratique se développe et s'étende sans cesse, que l'on ne l'oublie surtout pas, et qu'elle devienne facile à appliquer. Il faut donc consigner ses règles par écrit, il faut en marquer les différences, distinguer les internes des externes, et que chacune soit exprimée clairement, sans oublier les règles de manipulation des aiguilles. Tel est mon sentiment."

 

On voit que la question des "remèdes qui rendent malade" ne date pas d'hier, et le désir de Huang Ti, qui était en réallité un ordre indiscutable, inspira les médecins chinois pendant de nombreuses générations. C'est ainsi que fut officiellement instiutuée l'acupuncture en Chine, et l'Empereiur Jaune nous en donne la définition précise : piquer des "aiguille métalliques" en des endroits déterminés du corps, les Jing, c'est à dire des alignements de points (Xue) selon certaines "règles de manipulation", en tenant compte des "lois internes", ou lois physiologiques, et des "lois externes", les lois du cosmos, du milieu, afin d'agir sur "les déséquilibres du sang et du Qi".