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La dépêche du CATC

Dépêche / Janvier 2018

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Conte taoiste

Sage taoiste

 

Conte taoïste – Le prix de la compassion

(Les contes que nous vous proposons sont tirés de l’ouvrage « Contes des sages taoïstes », compilés par Pascal Fauliot, éditions du Seuil.

 

Le prince Mong Souen était à la chasse avec quelques courtisans. Ils traquèrent une biche avec son faon. Les chasseurs allaient les rattraper quand, au dernier moment, la mère leur échappa en sautant par dessus un ruisseau boueux, et elle détala dans les buissons. Son petit hésita un instant à la suivre. Le prince, impétueux, bondit comme un tigre sur le faon et réussit à le capturer. Il le confia, non sans cacher un sourire de satisfaction, à Tsinn Hsi pa, l’un des membres de sa suite, pour qu’il le ramène au palais. Pendant que celui-ci passait une corde au cou de l’animal afin de pouvoir le tirer derrière lui, le prince remonta à cheval et prit le chemin du retour avec le reste de son escorte.

Quelques heures après, le prince fit venir Tsinn Hsi Pa pour lui demander comment allait le faon et dans quelle partie du parc il l’avait mis.

Le courtisan se prosterna trois fois face contre terre et, sans lever la tête, répondit :

- Que Son Altesse veuille bien pardonner à son misérable serviteur. J’ai laissé le daim s’échapper !

- Comment est-ce possible ?

- La biche nous a suivi et, malgré le danger, elle est venue l écher son petit. Je n’ai pas eu le cœur de les séparer et j’ai relâché le faon.

Le prince cogna du poing contre l’accoudoir de son siège et, hors de lui, s ‘écria :

- Vous avez désobéi à mes ordres ! Quelle insolence ! Vous êtes banni de mes états. Déguerpissez au plus vite !

Trois mois plus tard, le prince fit rentrer d’exil Tsinn Hsi Pa pour lui confier le poste de précepteur.

A un courtisan jaloux qui s’étonnait qu’il récompense ainsi cet impertinent qui lui avait effrontément désobéi, le prince répondit :

- S’il a éprouvé de la compassion pour un faon, il en éprouvera sûrement pour mon fils. Et ce noble sentiment n’est-il pas le plus précieux à transmettre ? D’ailleurs le vénérable Lao-Tseu n’a-t-il pas dit : Etre sage, c’est connaître les hommes, être humain, c’est les aimer…?