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Dépêche / Janvier 2016

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Le mot du président

Datations et mesures

 

Nous sommes en 2016. Et les appels téléphoniques, les échanges de textos, de mails, quelquefois encore de courriers et de cartes de vœux y sont allés bon train. Bonne année, bonne santé… oui, la santé surtout !...

 

Mais sommes-nous en 2016 ?

 

Pour certains, nous sommes en 1437-1438, pour d’autres en 2558, pour d’autres en 5776, pour d’autres encore en 1465... Cela dépend des cultures, des civilisations, des religions.

 

Nous faisons démarrer l’année au premier janvier, mais cela n’est pas le cas de tout le monde, et cela n’en a pas toujours été ainsi chez nous.

 

Dire que nous sommes en 2016, ce n’est que convention pour un ensemble de gens qui font commencer la datation des années au moment de la naissance de Jésus-Christ ; de plus, tout le monde n’est pas d’accord sur la date du 25 décembre comme jour de sa naissance.

 

Hier nous étions en 2015, aujourd’hui en 2016, demain en 2017, lequel sera l’hier de 2018. Tout cela a-t-il une autre importance que celle très relative de nous permettre de nous situer dans le temps, en prenant des repères eux aussi très relatifs ? C’est un peu comme le mètre étalon déposé au pavillon de Breteuil : il occupe une certaine place dans l’espace et certains ont décrété que cette portion spatiale vaut 1 mètre.

 

C’est aussi comme la mesure de la température : quand l’eau se prend en glace, pour certains, il fait 0°, pour d’autres 32°. 

 

L’Homme pense qu’il mesure l’espace et le temps, et ses relevés spatio-temporels l’amènent à accorder une réalité objective à son approche de ce qu’il prend pour la réalité.

 

Le cosmos est mesuré en millions, voire milliards d’années lumière, et de toutes façons, personne n’en cerne les limites. C’est pareil pour le temps ; certains évoquent l’existence il y a très longtemps d’un Big Bang, mais avant ce Big Bang ? Rien ? Autre chose ? Depuis quand ?

 

Le temps en millions d’années, l’espace en millions d’années-lumière. Cela nous apprend-t-il vraiment quelque chose sur ce que nous sommes ? Lorsque nous dormons, que deviennent toutes ces mesures ? Que signifie la mesure de l’espace et du temps pour un rossignol qui chante, pour un ruisseau qui coule, pour un chat qui dort le ventre au soleil ?

 

Jean est né en telle année, il mesure sa vie à l’aune de sa date de naissance et des années qui l’en séparent. Bon anniversaire ! Bonne année ! Il se demande combien de temps encore… Combien d’années ?... Une de plus, une de moins !

 

Quand il fait un effort pour se remémorer ses premiers jours, rien ne vient à sa conscience mentale. Pas la moindre image, quelques souvenirs flous autour de ce qu’on lui a dit être ses deux ans. Et quand il pense aux années vécues, le poids qu’elle représentent n’a rien à voir avec une quelconque mesure. Il se doute qu’il se passe quelque chose. Il se situe dans l’espace sur fond de souvenirs géographiques anciens, et dans le temps sur fond de cycles saisonniers qui reviennent à intervalles réguliers, colorés d’évènements divers et variés, dont il n’arrive pas à savoir s’il les a provoqués ou simplement subis. Des photos jaunies arrivent à le convaincre qu’il a changé.


"C’est moi ce bambin ?" 
En se regardant dans le miroir, il n’en trouve pas trace. Il se doute qu’il y a une continuité quelque part dont il participe. Cette continuité s’exprime par des transformations dont il est le spectateur, ou peut-être l’acteur, voire les deux à la fois… Et l’auteur ? Non, pas jusque là ! Et pourquoi pas ?

 

Il en a voulu des choses depuis qu’il se perçoit comme individu confronté aux « autres », il en a obtenu, il en a oublié, il en a apprécié le dérisoire, le merveilleux, le mystérieux, l’impensable, l’inimaginable, le révoltant… Mais rien de mesurable dans tout ça. Et puis ce qui fut révoltant cessa de l’être, le merveilleux s'est transformé en dérisoire, l’impensable est devenu envisageable. Et lui, toujours là, à regarder, à tenter de discerner, à penser, expérimenter, à se demander au bout du compte qui regarde ? qui discerne ? Qui expérimente ? Qui se demande ?

 

Les dunes, comme les hommes, apparaissent dans le désert, se déplacent. Mais en se déplaçant, ne sont plus les mêmes dunes, ne sont plus les mêmes hommes. Car ce ne sont pas des dunes de sable. C’est du sable... qui apparaît en dunes. Même si nous mesurons la taille de la dune et la vitesse de son déplacement, cela ne concerne pas le sable. Lui, il est indépendant des dunes, qu’il laisse apparaître sous la caresse du vent.

  

Michel Laurent, président du CATC